Je rêvais d’être une étoile qui illuminerait les cieux… En fait non, être une étoile était stupide. Si on considère que ces boules de lumière sont à des centaines d’années lumières, elles sont des stars  en post-mortem. Nan, ce n’était pas ce que je voulais. C’était ce que je songeais en pédalant tranquillement sur le Stardust. Si je pouvais être célèbre, j’aimerais si possible que ce soit rapidement, genre là tout de suite. Comme ça j’aurais plus à travailler à sécher les cours comme un délinquant. Mes vieux pourraient vivre dans mon palace, j’aurais enfin un mannequin pour me vêtement, une  vrai cuisine tout équipé et plus de Toto à m’occuper. Ouais ce serait beau, mais il était mardi, j’avais fait l’école buissonnière pour récupérer la guitare de mon père et faire la manche dans la rue.

La réalité était vraiment cruelle quand même.

Mais bon, il faisait beau, c’était déjà ça. Et puis cette grande allée me motivait d’une certaine manière. Ces stars étaient des croulants – car quand on avait 16 ans, même 18 ans paraissaient vieux- donc j’avais le temps, mais le rêve devenait de plus en plus lointain. L’accident de mon père était pas méchants, mais il m’avait fait réalisé qu’il ne serait pas fringant éternellement, et je ne voyais pas mon frère s’en occuper vu ce qu’il était devenu…

Un coup de pédale et je vis un homme au loin.

… J’avais l’impression de le connaître. Tignasse rouge, air pédant et qui vous regardais de haut…  Putain, c’était le mec qui m’avait fait virer de mon job de serveur ! A cause de lui j’ai à me brûler les doigts dans l’eau avec des assiettes vides. En même temps il l’avait cherché à traiter le personnel comme des merdes.  En me rapprochant de cette parodie d’adulte,  je tentais de lui foutre un coup de poing en pleine tête, gueulant avec rage :

« C’est pour m’avoir fait virer conna… »

Mais voilà, j’avais pas franchement l’habitude de frapper un vélo et ce qui devait arriver arriva. La roue tourna brutalement, et le vélo tomba  sur  le côté. Une chute pour ma pomme et ça juste avant d’atteindre ma cible. Pour éviter d’abimer mon instrument, j’avais préféré tomber à plat ventre que de faire une roulade. De toute manière j’aurais été incapable de faire comme dans les films en retombant  sur ses pattes avec un salto arrière.   Au final j’avais glissé sur quelques centimètres, me raflant les avant-bras. Je gémissais, à plat ventre, avant de tenter de me relever péniblement.

« Putain… »

Le pire, c’est que j’avais même pas réussi à le toucher l’enfoiré. C’était pas parce qu’il était riche qu’il devait toujours s’en sortir. Je finirais bien par devenir riche et je l’écraserai. Parce que je brillerai comme du verre, instantanément au reflet du soleil. Et ça c’était cool.