Le soleil sur Tokyo est déjà haut dans le ciel quand tu te retrouves devant la porte du Salon, levant les yeux vers le dôme bleu où l'astre solaire jette ses rayons clairs et chauds entre les murs gris et sales des bâtiments de l'artère perdue de Ruppongi, touchant doucement ta peau pâle. Neuve heures sonnant sur ton portable, tu ouvres les locaux blancs sans aucune imperfection. Seule dans le silence tu allumes les disjoncteurs, pose ton gros sac brun sur le comptoir, et tu t'étires. C'est un samedi que tu pourrais passer dehors à déambuler comme une âme en peine dans les quartiers et les rues de Tokyo, mais non, tu es ici, dans cet endroit qui est ta maison depuis maintenant presque deux ans, à attendre un rendez-vous spécial.

Tachibana Arizona, lis-tu sur l'écran de l'ordinateur du comptoir. Un léger sourire sur les lèvres, et le coeur joyeux tu passes le rideau rouge de l'une des pièces du fond, celui de l'atelier et dans l'une des étagères tu cherches ton classeurs professionnel.

Celui-ci trouvé, tu le déposes sur un plateau métallique, puis tu fouilles un peu dans les placards pour trouver une encre de chine noire ; couleur que vous utilisez finalement très peu. Ou du moins pas en masse comme tu vas le faire.

Lorsque tout est près sur métal gris et froid, machine, couleur, et plan, tu le prends et sors de la pièce, revenant dans à l'accueil et tombant sur une fille aux cheveux bleus à l'air farouche. A sa vu, tes pas se ralentissent et tu lui fais un sourire chaleureux.

▬ Salut, vas dans la salle numéro une, désignes-tu de la tête, j'arrive bientôt.

Avec toi, lorsque le travail est de mise tu ne tournes pas autour du pot. D'ailleurs, tu ne tournes jamais autour du pot. Te dirigeant de nouveau vers le comptoir tu sors une boite de gants et d'anti-sceptique, avant de partir dans la salle que tu as désignée à Tachibana.

▬ Bon alors. On avait dit en dessous de l'épaule c'est ça ? Demandes-tu en posant le plateau sur la table de rangement.

De là, tu tournes les pages de ton classeur jusqu'au moment où tu tombes sur la double page de renseignement, avec les croquis que tu as réalisé de la demande de Tachibana Arizona.

Sortant un masque d'un des tiroirs tu déblatères :

▬ A la verticale... de ce que je vois... avec seulement de l'encre noire... sur cinq centimètres de long...

Tu te retournes vers la demoiselle à laquelle tu faisais dos, avec une feuille de dessin dans la main, avec dessus un squelette de poisson à la forme fluide nageant dans le néant clair du grain du papier, bien trois ou quatre fois plus gros que la taille demandée.

▬ C'est bien ça ? Que je ne me trompe pas de modèle, exposes-tu en t'asseyant sur une chaise près de la table de travail.

Masque sur les genoux, tu reprends ton calme habituel et enjoué, aillant surement passer pour une personne froide, voir sans âme avec cette façon que tu as de questionner, un peu pour toi, et sans un regard, ou presque.

Levant tes yeux clairs vers la donzelle, tu lui accordes un sourire.

Aujourd'hui, c'est tatouage. Ça, c'est vraiment cool. C'est avec cette pensée que tu te lèves, ce matin, un léger sourire aux lèvres. Et le sourire à tes lèvres, c'est vraiment rare, pour être honnête. En vrai, tu es la fille toujours blasée et froide qui vous fout des frissons dans le dos, rien qu'avec un regard-de-la-mort-qui-tue. Sauf quand t'es énervée, évidemment. Mais là, c'est pas un sourire que tu as. Sinon, quand tu te moques des gens tu souris. Mais c'est juste pour te foutre de leur gueule, en fait. Ce qui n'était, en soi, pas réellement sympa. Donc pas dans l'esprit positif du sourire. Bref, toujours est-il que nous nous égarons.

Tu étais donc plutôt contente ce matin-là. Tu ne t'étais jamais fais de tatouages principalement parce que tu n'avais pas l'argent mais aussi parce que en vrai, tu étais une froussarde. Mais tu en avais honte donc tu disais que t'avais pas besoin de tatouage avec un petit air suffisant.

Tu arrives finalement dans le salon et Mei te diriges, sous ses ordres, dans un salon métallique, brillant et entièrement argenté. Ça t'aurait presque aveuglé, ce puits de lumière. Mais tu avais tes lunettes de soleil, donc ça allait, au final. La demoiselle aux cheveux blancs finit par revenir et te pose une série de questions, auxquelles tu réponds toute à l'affirmative.

► si tu rates, j'ai de très bon potes yakuza qui viendront te rendre une petite visite. mais je dis ça, je dis rien. je m'en voudrais de te foutre la pression. , dis-tu avec un sourire aux lèvres.

Tu sais très bien que ça va lui foutre justement, sale enflure. Mais tu dis ça aussi pour te rassurer, toi aussi, parce que tu flippes sa mère en vrai. Parce que tu fais genre tu rigoles et t'es détendue. MAIS NON C'EST FAUX. C'est pas que t'as pas confiance en Mei, non, pas du tout. C'est juste que voilà l'aiguille tu rigoles jusqu'à ce qu'elle approche VRAIMENT de ta peau. Mais non voyons, pourquoi avoir peur ? Respire, respire, tout ira bien. C'est bon, t'es détendue. Tu crois. Tu as juste ce petit sourire moqueur aux lèvres.

F-Lawless allait-elle te tuer pour ce tatouage ? Non. Tu espères en tout cas.