Carolyn était assise dans un bar. Un verre à peine entamé était posé juste devant elle. Avec sa bouille des jours tristes, elle regardait dehors, là où les nuages blancs obscurcissaient les esprits. Un peu de tranquillité ne faisait pas de mal, c'était rare de la voir seule assise quelque part. Perdue dans ses pensées, elle n'entendit pas les pas des trois hommes qui se rapprochaient d'elle. Ce fut juste au moment où l'un deux passa son bras autour de ses épaules qu'elle les remarqua. Les fusillant du regard, elle se dégagea brusquement, ce qui ne servit qu'à les faire rire. De la viande saoul. Parfait pour terminer un après-midi déjà mal commencé. Jetant un bref regard autour d'elle, elle se résolut à s'en sortir elle même. Sa main siffla dans l'air et atterrit violemment sur la joue du premier.

La jeune femme le regardait, amusée. Elle lui était reconnaissante d'être intervenu, mais s'interrogeait sur sa capacité à apparaître plus subitement qu'un courant d'air. Elle laissa couler son regard sur les différents corps qui choyaient à terre. « Tu ne m'en as même pas laissé un bout ? Tu dois avoir passé une encore plus mauvaise journée que moi. Enfin, c'est gentil quand même. » Elle revint à Heiké. Il attendait probablement un merci et même un coup à boire, mais elle aimait le taquiner. « C'est simplement dommage que la belle demoiselle en détresse ne soit que moi, je t'offrirais uniquement ce siège et le plaisir de ma compagnie. » fit-elle avec un clin d’œil.  

Carolyn se rendit vite compte que son ami était ailleurs. Il semblait la prendre pour une inconnue. Les yeux brumeux -peut-être à cause de l'alcool ?- il semblait avoir encore plus de problèmes que la fois où ils s'étaient rencontrés.

Pourtant, ce soir là, dans un bar comme on en trouve partout, à écouter la pluie tambouriner contre les vitres, ils s'étaient si bien trouvés qu'ils n'avaient pas pu faire autrement que de se revoir, parfois même contre leur volonté. Ils s'étaient peu de temps après bousculés au marché et avaient passé une dizaine de minutes à se crier dessus avant de se reconnaitre et d'aller prendre un verre.

La jeune femme revint dans le présent et claqua ses doigts devant les yeux d'Heiké. «Allo la lune, je cherche à joindre Heiké Hawthorne, vous pourriez me le passer ?» Son ton était enthousiaste mais ses yeux trahissait son inquiétude.